Bataille (N.)

Experts et consultants au service de l’action publique locale

Une approche pragmatique du travail de l’ingénierie privée

Thèse de doctorat en Aménagement de l’espace et Urbanisme (UMR AAU / UMR CITERES)

6 mars 2020

Nicolas Bataille est docteur en Études urbaines de l’Université de Tours et diplômé de l’Institut d’Études Politiques de Grenoble et du Master 2 Villes et Territoires de l’Université de Nantes/Ensa Nantes. Il réalise actuellement un post-doctorat dans le cadre du projet GrinnUrb.

Soutenance le 6 mars 2020 à 9h30 à la Maison des Sciences de l’Homme Val de Loire

Résumé de la thèse :

Dans l’aménagement de l’espace et de l’environnement, les acteurs de l’ingénierie privée occupent une place grandissante dans la mise en œuvre des politiques publiques. Ces invisibles des projets, parfois considérés comme des « experts », sont réputés accompagner les collectivités locales sur les dimensions techniques. Du reste, ils ne sont pas imperméables aux mutations contemporaines du capitalisme qui affectent l’action publique locale. Dans ce contexte, ils se veulent acteurs du changement et soutiennent des approches renouvelées pour répondre à une complexification supposée.
À partir d’une enquête ethnographique, cette thèse qualifie le travail de ces bureaux d’études, sociétés d’ingénierie et de conseil dans l’action publique locale. Le cadre de la sociologie pragmatique des épreuves permet de comprendre le travail d’élaboration de dispositifs, mais aussi de production de catégories et de critique, qui est au principe de leur activité. Ce travail documente notamment un changement normatif global autour de la notion de projet au détriment d’une rationalité techniciste, modifiant l’action publique locale dont l’ingénierie privée est un miroir. Tout d’abord, dans l’organisation et le travail, les pratiques de l’expert sont dévalorisées face aux capacités d’animation prêtées au chef de projet. Pour autant, ce dernier subit les injonctions contradictoires de la mise en discussion permanente. Ensuite, face au client, l’ingénierie s’affiche de plus en plus comme « consultant », pour transformer la relation d’exécutant en partenariat. Cette coordination engendre un travail de négociation du besoin tout au long de la mission. En outre, les changements globaux dans la division du travail en aménagement favorisent une coordination plus locale et incertaine au détriment d’un État technocrate. Le recours à l’ingénierie privée est vu comme un moyen de retrouver de la souplesse entre des acteurs de plus en plus nombreux. Enfin, le travail de l’ingénierie dans le cours des projets montre, au-delà de la technique, l’important travail politique de composition d’un collectif et d’attribution des rôles pour permettre l’aboutissement du projet.
Finalement, cette étude montre l’évolution de la coordination dans la fabrique de l’espace, entre maintien de dispositifs de la décision linéaire et nouvelles modalités d’échanges itératifs. Ce compromis amène à un confinement des débats politiques sur les fins du projet, alors que la priorité est donnée aux moyens de le faire aboutir.

Mots clés : études d’urbanisme, pratiques professionnelles, recherche-action, fabrique des territoires, fabrique urbaine, méthode, expertise, conseil, conception, projet, cécision

Le jury est composé de :

 Rémi BARBIER, Professeur, ENGEES Strasbourg - rapporteur
 Elsa VIVANT, Maîtresse de conférences HDR, Université Paris-Est Marne-la-Vallée - rapportrice
 Marie-Pierre LEFEUVRE, Professeure, Université de Tours - examinatrice
 Magali NONJON, Maîtresse de conférences, Sciences Po Aix - examinatrice
 Luca PATTARONI, Maître d’enseignement et de recherche, EPFL Lausanne, examinateur
 Laurent DEVISME, Professeur, ENSA Nantes, UMR AAU 1563, CRENAU - directeur de thèse
 Denis MARMOUZET, Professeur, UMR CITERES Université de Tours, directeur de thèse
 Matthieu NEDONCHELLE, Directeur général, Groupe CISN - invité

Voir en ligne :
 Le résumé de la thèse sur le site thèses.fr
 La page personnelle de Nicolas Bataille