Duranel (G.)

Les conventions de l’Architecture au prisme du dispositif du Grand Paris

Thèse de doctorat en Architecture, Urbanisme et Environnement effectuée à l’École doctorale Abbé Grégoire au sein du Laboratoire Architecture, Ville, Urbanisme, Environnement (Unité Mixte de Recherche-Lavue) et de l’ENSA Paris-La Villette sous la direction de Jodelle Zetlaoui-Léger et Isabelle Grudet. Thèse soutenue le 9 décembre 2019.

9 décembre 2019 / Travaux universitaires

"La consultation « L’avenir du Paris métropolitain, le grand pari de l’agglomération parisienne », organisée en 2008 par le Bureau de la Recherche Architecturale, Urbaine et Paysagère (BRAUP) à la demande du Président de la République, réunit dix équipes dirigées par des architectes et regroupe des chercheurs et des professionnels de l’aménagement. Elle se poursuit en 2010 avec la création de l’Atelier International du Grand Paris (AIGP) puis avec cinq équipes supplémentaires en 2012. L’expérience dure jusqu’en 2016. Au moment où l’État engage un certain nombre d’actions pour transformer l’espace francilien, – la création d’un Secrétariat d’État, la mise en place d’une société d’aménagement métropolitaine et la promulgation de trois lois –, des professionnels et des chercheurs sont réunis pendant huit ans pour contribuer à la production d’un « diagnostic prospectif » pour l’agglomération parisienne. Comment ces professionnels ont-ils été sollicités ? Comment se sont-ils mobilisés et autour de quelles compétences ? Dans ce contexte et face à une demande politique portée au sommet de l’État, comment ont travaillé ces équipes et quelle est la nature de leurs productions ?""

"Positionnée dans la lignée de recherches portant sur les métiers de la fabrication de la Ville, cette thèse aborde les années 2008 à 2016 comme une période particulièrement susceptible de nous renseigner sur les relations qui se tissent entre les milieux de l’Architecture et de l’Urbanisme et celui de la recherche architecturale et urbaine. L’articulation de trois concepts, « dispositif », « champ » et « monde », a permis tout au long de cette thèse d’analyser les interactions qui s’établissent entre des professionnels et des chercheurs venant de différentes disciplines, tout en prenant en compte le contexte d’une commande étatique qui trouve son origine dans la volonté d’un président d’imposer son projet face à celui de la Région Île-de-France. Cette thèse montre notamment que la sollicitation d’équipes dirigées par des architectes de renom a été portée par un enjeu communicationnel, propre aux projets présidentiels et renvoyant à une vision de l’architecte comme homme de l’art. Nous faisons le constat que les architectes, par leur capacité à produire des discours aux apparences performatives, ont contribué à rendre légitime l’action étatique en Île-de-France. Cette proximité avec le pouvoir présidentiel a pérennisé des figures canoniques de l’architecte comme « chef d’orchestre » ou « homme de synthèse ». L’association obligatoire de chercheurs dans ces équipes a par ailleurs eu, pour le BRAUP, un objectif de valorisation des pratiques de recherche qui favorisent une plus grande proximité avec le « monde » professionnel ainsi qu’une visée opérationnelle. En analysant les équipes comme des « structures d’action collective », ce travail contribue à identifier les « conventions » qui ont guidé ces collaborations : la primauté du canal visuel dans la formulation de la pensée, l’ambition de réaliser une synthèse des propos par un projet spatial ou encore la monstration d’artefacts architecturaux comme moyen de démontrer le bienfondé d’une stratégie territoriale. La thèse aboutit au constat que les « conventions » venant du « monde » de l’Architecture ont eu tendance à s’imposer face à celles provenant d’autres disciplines. Il en a été de même lorsque les productions réalisées ont eu pour vocation de faire œuvre de recherche. On note ainsi un usage généralisé d’outils habituellement destinés à transformer l’espace pour produire des connaissances qui acquièrent ainsi une propension à servir des actions subséquentes. Cette thèse ouvre la question de la valeur de l’action dans la production de connaissances en Architecture."

SOMMAIRE

Introduction

  • L’articulation de trois concepts, « champ », « monde » et « dispositif », pour étudier la consultation de 2008 et l’AIGP
  • Trois corpus pour construire trois angles d’approche
  • Plan de la thèse

Première partie : Le dispositif du « Grand Paris »

  • 2007-2009 : La construction d’un espace de légitimité pour l’État
    • Les outils étatiques d’aménagement de l’agglomération parisienne au XXe siècle
    • Créer un espace pour l’action présidentielle
    • Des usages politiques de la « métropole »
  • La consultation de 2008 : rendre visibles des pratiques de la recherche sur la Ville
    • L’histoire des politiques publiques pour la recherche architecturale selon Éric Lengereau
    • Une consultation pour valoriser une forme de recherche architecturale
  • Consultation de 2008 et Secrétariat d’État : des transferts de capitaux symboliques et des différences d’objectifs
    • Les relations entre la consultation de 2008 et le Secrétariat d’État
    • Des relations d’interdépendances et des différences de valeurs inscrites dans la durée
  • L’AIGP, une fabrique de discours
    • 2010-2013, la formalisation progressive du rôle communicationnel de l’AIGP
    • 2014, un problème de légitimité pour l’AIGP
    • 2015-2016 : la direction de Mireille Ferri, le tournant médiatique de l’AIGP

Deuxième partie : Structures d’action collective et conventions

  • La constitution des équipes
    • Analyse de la composition des équipes des consultations de 2008 et 2012
    • Réunir des conditions pour constituer une équipe
  • Le « Conseil Scientifique » et les équipes, des espaces hiérarchisés
    • « L’agencement » des équipes, un marqueur des hiérarchies entre les individus
    • Les relations au sein du « Conseil Scientifique » de l’AIGP
  • Les « conventions » et les productions graphiques
    • Simuler l’action par les vues en perspective
    • La « vision » et la posture de « l’homme providentiel »
    • Le récit : une réponse à une demande politique
    • Objectivation de l’espace francilien et registres de production de connaissances
  • Les livres sur le « projet » et la production de connaissances
    • Les Territoires de l’Urbanisme de Paola Vigano, une épistémologie du projet
    • Paris / Babel de David Mangin, entre monographie et manuel

Conclusion

  • Un « dispositif » pour le « Grand Paris » qui oppose logos et praxis
  • Les « conventions » de l’Architecture dans ce « dispositif »
  • Deux figures d’architectes valorisées dans ces « appels à compétences »
  • De l’épistémologie politique de l’Architecture à une axiologie de l’action
  • Apports méthodologiques de l’articulation des concepts de « monde » et de « champ »

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