Guenot (M.)

Entre ethos professionnel et logiques d’entreprises

La recherche et l’innovation dans les agences d’architecture

Les Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère 9|10, 28 décembre 2020.

28 décembre 2020 / Articles scientifiques

"Encouragés par une politique publique, incitative et de réforme, les dirigeants d’agences montrent un intérêt certain pour l’intégration de pratiques de recherche ou d’innovation dans leurs structures. Cependant, les dispositifs de droit commun ouverts aux agences d’architecture et prévus pour valoriser la recherche et l’innovation sont jugés insuffisamment investis par le champ de l’architecture (CIR, CII, CIFRE). Pour participer à la compréhension de ce phénomène, nous interrogeons les manières dont les architectes dirigeants appréhendent ces notions, les pratiques qu’ils leur associent et leur possible intégration au sein des structures. Nous avons pu vérifier ainsi la dualité à laquelle ils se confrontent : penser l’évolution des pratiques professionnelles et des structures qui les accueillent en réponse aux multiples défis auxquels est confronté le champ de l’architecture, tout en respectant les codes, valeurs et normes hérités d’une profession libérale."

"Les agences d’architecture sont de plus en plus encouragées, voire fortement conviées à s’approprier les champs lexicaux de la recherche et de l’innovation. Au sein du premier numéro de la nouvelle formule des Cahiers de la recherche architecturale, urbaine et paysagère, titré Innover ?, Stéphane Berthier écrit « l’innovation est un mantra de notre époque en crise [1] » ; nous proposons d’interroger comment cette maxime anime le champ de l’architecture et plus particulièrement, comment la recherche et l’innovation sont appréhendées et pensées au sein des agences d’architecture.

La dénomination « agence » est généralement préférée à celle d’« entreprise d’architecture », et ce malgré une baisse du nombre d’architectes exerçant en libéral, c’est-à-dire au sein d’entreprises individuelles [2] (EI ou EIRL [3]), au bénéfice d’une structuration des agences en sociétés. Toutefois, il est important de rappeler que l’abandon progressif de l’exercice d’une activité libérale en nom propre ne doit pas être confondu avec le caractère libéral de la profession d’architecte [4]. Ce dernier renvoie à des qualités, des valeurs qui sont au cœur de l’ethos professionnel : l’indépendance, le désintéressement et le caractère intellectuel de la profession [5]. Le développement des agences d’architecture oscille ainsi entre logiques entrepreneuriales et ethos d’une profession libérale. Valérie Champetier et Cédric Fischer parlent même d’un passage d’une « forte culture individualiste, celle de l’intuitu personae [6] » à « la construction de marques [7] ». Entre codes, valeurs et habitus d’une profession libérale et développement de stratégies entrepreneuriales, comment la recherche et l’innovation deviennent-elles des composantes des stratégies de développement des agences d’architecture ?[...]"

PLAN DE L’ARTICLE

La recherche et l’innovation en architecture, solution ou injonction ?

  • Les politiques publiques relatives à la recherche et l’innovation en architecture
  • Les dispositifs de droit communs

« Recherche - Développement - Innovation » (RDI) du point de vue des dirigeants d’agence

  • Les agences d’architecture et la structuration en entreprise
  • Les politiques de développement des agences
  • La commande

Introduire des activités de recherche ou d’innovation au sein des agences d’architecture

  • Se couper de la production courante
  • Construire un projet de recherche
  • Prétendre aux dispositifs de droits communs

Conclusion

Lire l’intégralité de l’article sur le site de la revue

[1] Stéphane Berthier, « Le développement expérimental en situation de projet. Études des modes constructifs en bois dans l’architecture de Lipsky + Rollet », Les Cahiers de la recherche architecturale urbaine et paysagère, 2018, no1, p. 1.
[2] L’architecte ne constitue qu’une seule et même personne avec son cabinet et est solidairement et indéfiniment responsable des dettes de son activité sur son patrimoine personnel. Vor Lydia Di Martino, Gwénaëlle Creno, « Activité libérale, société d’architecture : toutes les formalités de création », Cahiers de la profession, no22, 2005.
[3] Entreprise individuelle ou entreprise individuelle à responsabilité limitée.
[4] Ordre des architectes, Archigraphie 2018, Observatoire de la profession d’architecte, 2018, p. 142., [en ligne] https://issuu.com/ordre-national-des-architectes/docs/archigraphie-2018, consulté le 30 mars 2020.
[5] Isabelle Chesneau (dir.), Profession architecte, Paris, Eyrolles, 2019, p. 73.
[6] En droit, l’intuitus personae fait appel à la considération de la personne. Voir Raymond Guillien, Jean Vincent (dir.), Lexique des termes juridiques, 15e éd., Paris, Dalloz, 2005, p. 352.
[7] Valérie Champetier, Cédric Fischer, « Transmission et reprise des entreprises culturelles : Quels enjeux de politique publique ? », Culture études, no2, ministère de la Culture/DEPS, 2015, pp. 9-10.