Horsch (B.), Ouvrard (P.)

Les figures et conditions d’insertion professionnelle des jeunes diplômé.e.s en architecture (2015-2018) : le cas de l’ENSA Nantes

Agence nationale de la recherche (ANR), 2023.

26 mars 2023 / Rapports

"L’ENSA Nantes recrute majoritairement ses étudiants parmi les élèves issus de classes socioprofessionnelles moyennes et supérieures dotés de capitaux social et culturel élevés leur donnant un avantage par rapport aux étudiants issus des classes populaires."

"Si les données quantitatives sur la perception de leur facilité ou difficulté à s’insérer dans la vie professionnelle montrent que les catégories populaires sont désavantagées de nouveau, une analyse qualitative plus fine permet de pondérer ce constat : les étudiants des catégories populaires compensent en multipliant les expériences professionnelles pendant leurs études et à travers la cooptation par des enseignants. Cette pondération est également valable pour les diplômés issus des classes supérieures, qui perçoivent leur insertion comme « difficile ». Leur capitaux acquis avant et pendant la formation leur permettent d’agir comme défricheurs de nouvelles pratiques susceptibles de leur procurer un capital symbolique qui peut se déployer à long terme."

"Cette étude s’inscrit dans le prolongement d’une thèse de doctorat portant sur la socialisation professionnelle des étudiants et diplômés architectes à l’ENSA Nantes [1]. Si celle-ci portait sur les sortants de l’école de 2011 à 2014, cette nouvelle enquête, menée auprès des diplômés de 2015 à 2018, propose une analyse des parcours et de l’insertion professionnelle à l’aulne de leurs origines sociales. En effet, le mode de recrutement des écoles d’architecture favorise l’admission d’étudiants issus majoritairement des classes socioprofessionnelles moyennes et supérieures [2] dont l’ensemble des capitaux (culturel, économique et social) semble les avantager par rapport à la minorité d’étudiants issus des classes populaires admis, tant pour l’entrée dans les écoles que lors de l’insertion professionnelle. Ainsi, l’analyse quantitative démontre que les inégalités sociales semblent se rejouer au moment de l’insertion professionnelle, favorisant les jeunes architectes issus des classes dites « privilégiées » – quand bien même l’école semblait avoir « compensé » ces inégalités au regard des résultats universitaires des différentes catégories sociales enquêtées [3]"

[1] HORSCH Bettina, Architecture d’un métier – Les étudiants architectes entre orientation, socialisation et insertion professionnelles : Le cas de l’ENSA Nantes, Thèse de doctorat sous la direction de Laurent Devisme et Frédéric Charles,
Université de Nantes, 2021

[2] En effet, le taux d’étudiants issus d’un père appartenant aux professions et classes socioprofessionnelles supérieures(PCS+) inscrits à l’ENSA Nantes en 2016 (50 %) est de trente points au-dessus de la moyenne nationale (20 %). Ibid, p. 148.

[3] À ce titre, voir recherche parallèle sur l’acquisition d’un capital spatial spécifique permettant une compréhension de l’espace et de sa traduction en projet d’architecture et d’urbanisme, capital grandement valorisé par l’institution. Cf. HORSCH Bettina, OUVRARD Pauline, « Devenir architecte(s) : des espaces de socialisation au capital spatial. Enquête par entretiens semidirectifs filmés et récurrents, le cas des étudiant.e.s de l’ENSA Nantes », L’enseignement de l’architecture au XXe et XIXe siècles (ensARCHI), Rapport de recherche, 2023